Nous nous sommes réveillés tôt ce matin avec le chant des coqs et des canards. La nuit a été compliquée : neuf personnes dormant à même le sol dans une cahute sur pilotis, ça secoue pas mal. Nous avons profité du temps nécessaire à la préparation de notre déjeuner pour visiter le village de bon matin. Bonne occasion pour observer les villageois prendre leur petit-déjeuner autour du foyer allumé devant chaque maison, entouré des chiens en quête de restes, les enfants partir à l'école avec leur panier-repas (riz gluant et rat grillé), les grand-mères prendre soin des tout petits, la pipe à la bouche... Après un petit-déjeuner composé de riz gluant et d'omelette aux légumes, notre guide nous emmène visiter l'école. Nous rencontrons les deux instituteurs qui s'occupent d'une cinquantaine d'enfants répartis en quatre classes. C'est l'heure de la récréation et les élèves en costume jouent dehors. Ce matin, ils ont hissé le drapeau du Laos devant l'établissement et chanté l'hymne national, comme tous les lundis. Le pavillon flottera dans les airs jusqu'à vendredi soir, où il sera redescendu pour le week-end.

Nous reprenons ensuite notre route. Nous marchons d'abord sur une large piste qui relie depuis peu la vallée à la route goudronnée. 8 heures de trajet tout de même pour faire les 25 kms en camion, 6 heures en moto. Le soleil tape fort et, comme nous avons marché sous le couvert des arbres toute la journée d'hier, nous n'avons pris ni crème solaire ni chapeau aujourd'hui. Nous demandons à notre adorable assistant guide de confectionner un chapeau à Arnaud dans une feuille de bananier, ce qu'il s'amuse beaucoup à faire.

Nous traversons un second village, Ban Nalan Tai. Nous apprenons que, à l'origine, il n'y avait que le village de Ban Nalan Neua. Quand sa population est devenue trop importante, elle s'est séparée en deux et certains villageois ont fondé Ban Nalan Tai, à quelques kilomètres de Ban Nalan Neua. Les deux villages fonctionnent toujours ensemble, leurs finances sont communes. Ils vivent en autosuffisance alimentaire grâce à la culture du riz, l'élevage de buffles d'eau, de chèvres, de cochons et de poules et aux multiples potagers de chaque foyer. Lorsqu'ils ont besoin d'argent, pour acheter de la lessive par exemple, ils vont récolter des champignons ou du bambou et partent le vendre en ville. Le statut de parc national du territoire qui les entoure ne semble pas être trop contraignant. S'ils ont besoin de plus d'espace pour les cultures, ils en font la demande auprès du gouvernement et de nouvelles terres sont allouées à l'agriculture. En revanche, ils ne peuvent pas les choisir par eux-mêmes. Et, s'ils avisent de couper un gros arbre, ils encourent une peine de prison.

Nous reprenons notre chemin jusqu'au village suivant, de l'ethnie Lanten. Nous y voyons un habitat différent, les maisons ne sont plus sur pilotis, sauf une car une fille du village a épousé un Khmu. Nous visitons une maison. Le sol est en terre battue, il n'y a qu'une grande pièce dans laquelle on trouve un foyer, un lit pour les invités et la moto de la famille. Une cloison en paillasse sépare le lit du couple du reste de la famille. Ici, la cuisine se trouve à l'intérieur de la maison. Le peuple Lanten est animiste, comme les Khmu, mais il ne croit pas en l'esprit de la cuisine.

Nous voilà repartis en forêt. Nous grimpons un chemin fort pentu mais moins glissant que celui d'hier, nous sommes chanceux qu'il n'ait pas plu de nouveau. La forêt alterne entre jungle et bambouseraie. Nous entendons les oiseaux. Nous demandons à notre assistant guide de nous montrer les animaux qu'il voit. Nous peinons à apercevoir les écureuils qu'il nous désigne.

Nous faisons halte sous les bambous pour déjeuner. Nos guides installent une nappe en feuilles de bananier et disposent les aliments dessus. Nous partageons du riz gluant, des légumes délicieux et du poulet ultra coriace.

Nous repartons ensuite pour atteindre une crête qui nous offre un très beau panorama. Malheureusement, il fait tellement chaud que l'on ne s'attarde pas trop à l'admirer pour rejoindre au plus vite l'ombre des arbres. Nous marcherons en tout 5 heures aujourd'hui, avec pas mal de dénivelé mais plus de facilité qu'hier car le sol est moins glissant.

Nous arrivons avant la nuit au camp des pêcheurs, notre refuge pour ce soir. Pas de village cette fois-ci, nous nous trouvons en pleine jungle, le long de la rivière Nam Ha. Nous nous précipitons d'ailleurs dedans pour nous rafraîchir et nous laver, deux besoins devenus essentiels. Ça fait du bien ! Mais c'est infesté de sangsues. Nous avions réussi à passer à travers depuis notre arrivée dans la jungle mais Camille finit par en attraper une (ou plutôt l'inverse).

Nous nous installons ensuite dans la cabane sur pilotis qui nous servira de refuge pour la nuit. Il n'y a pas assez de lits pour tout le monde, nos guides partent donc couper quelques bambous pour en confectionner de nouveaux. Deux sacs de riz sur un cadre en bambou et le tour est joué. Les moustiquaires sont installées, une couverture par personne et nous voilà parés pour la nuit !

Le dîner est préparé sous un petit abri à côté du refuge. Nous avons à nouveau notre nappe en feuilles de bananier et partageons un repas de... riz gluant avec de délicieux légumes !

Puis, notre guide nous raconte des histoires, dont la sienne, autour du feu. Et, soudain, alors qu'il fait nuit noire et que certains commencent à piquer du nez, il nous propose de partir pêcher avec ses deux harpons fabriqués au cours des deux derniers jours. Certains d'entre nous partent donc dans la jungle pour "5 minutes de marche vers la rivière". Toujours se méfier de la notion du temps et de la distance propre au peuple Lao... Pas facile pour ceux qui sont partis sans lampe ou en claquettes. Nous finissons par arriver à l'endroit que nos guides peinent à trouver, en ouvrant des passages à l'aveugle avec leurs machettes.

Ils allument un feu, nous confient le soin de l'entretenir, se déshabillent et se mettent à l'eau, avec leur harpon. Nous nous y appliquons donc, en nous amusant à imaginer ce qui adviendrait de nous s'ils ne revenaient pas. Mais nous ne le saurons jamais car ils finissent par rentrer tous contents, avec sept grenouilles et de nombreux poissons, dont deux assez gros.

Nous rentrons au camp par un autre chemin, plus court, tout en cueillant des fougères pour leur petit-déjeuner de demain. Arrivés au camp, ils mettent à cuire sur le feu les deux gros poissons et nous les dégustons voracement car ils sont délicieux !!!

Ensuite, nous rejoignons chacun notre "brancard" pour une nuit bien méritée.